[2006] Toujours l’orage

Réalisations Artistiques

Compagnie l’Alchimiste – Colmar (68)

Cette nuit froide va nous changer tous en fous et en déments », dit le Fou de Lear, tandis que l’orage sévit sur la lande, à l’acte III de la tragédie que Shakespeare écrivit au début du 17è siècle.C’est à la fin du 20è siècle, par une autre nuit froide, que Nathan Goldring, jeune metteur en scène autrichien, vient proposer à Theo Steiner, figure mythique du théâtre viennois d’après guerre, de mettre un terme à 25 années de silence et d’exil, pour jouer Lear sur une scène berlinoise : il lui propose de jouer Lear.

Tous deux hantés par l’ombre de Lear, comme si le roi déchu était la clef permettant à chacun de retrouver les fragments épars de sa propre identité, ils s’enferment alors dans un huit clos, scandé par le retour incessant de l’orage et de bribes du texte shakespearien. Entre les deux hommes va finir par se tisser une étrange complicité ; aux bravades et à l’ironie féroce succède le constat de leur propre « émiettement », de leurs doutes et de leurs déchirures.

Revisitation de Shakespeare, cruelle méditation sur l’histoire et le génocide juif, féroce partie d’échecs langagière, Toujours l’orage est aussi l’occasion pour Cormann de poursuivre une méditation sur le pouvoir des mots dans un théâtre de l’existence humaine si effrayant qu’aucune oeuvre d’art, aucun comédien ne semble jamais pouvoir racheter les fautes qui y sont commises.

« un théâtre de la parole, méditatif[…] un théâtre de mémoire; un théâtre pensif.» (E. Cormann – H. Bornstein)

Création et réalisation sonore : Romain Drogoul et Bérenger Recoules